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Voyager autrement, aperçu des Pyrénées, 11-21 mai 2023

Le retour direct à la maison serait trop brusque, après une étude détaillée des transports publics, nous louons une voiture.

Départ pour la Vallée du Lot, direction Puy-l’Évêque, la météo est toujours mitigée.

Puis cap au sud, visite de Montcuq, puis de Lauzerte, village médiéval charmant, mais plein de pélerins; pas facile de changer de peau, plus de regards croisés, de l’indifférence, malgré nos souliers, nos sacs, la coquille.

Par contre, hors chemin, nous partageons un déjeuner très chaleureux avec un couple louant une chambre d’hôtes et un appartement de vacances créé avec goût dans la cave (ferme de Laspeyrière).

A Moissac, grande église et cloître roman,  nous arrivons en même temps que quelques dizaines de Harley Davidson et grosses cylindrées BMW se garant le long de l’église.

Une grande croix au sol faite de fruits et de légumes complète nos interrogations. La procession de la fête des Rogations va partir.

Cette bénédiction des champs et hommage aux agriculteurs était trés ancrée dans les traditions de cette région et est à nouveau célébrée avec une population enthousiaste grâce au prêtre vietnamien de la paroisse. Jeune et dynamique, cette année la procession se fera à motos de village en village. C’est aussi la journée où les catholiques du Portugal fêtent Fatima, la Vierge. Chants religieux dynamiques des îles, (communauté agricole de Polynésie française), prière à St Christophe, patron des voyageurs, lue par un motard, « Bénédicté » classique chanté où les paroles ont été remplacées pour une bénédiction des motards, statue de la Vierge embarquée à l’arrière d’un pick up qui monte les petites marches en pavés devant l’église, et finalement l’abbé, grimpant en soutane, « bénitier portatif » à la main comme passager de la première moto.

La scène est vraiment intéressante, gaie et quelque peu hétéroclite. Le départ est donné après un concert de « coups de gaz » bien orchestré; j’avais compris que les cloches allaient sonner, erreur… Surprenant ? Cet homme, fils d’agriculteurs, semble très proche de ses ouailles. La recommandation de revenir au retour de la tournée pour la messe dédiée aux agriculteurs nous est donnée, certaines femmes vont y venir en costume traditionnel et l’accent sera mis sur la multi-culturalité. Nous renonçons pour continuer notre route, l’appel de Saint-Jean-Pied-de-Port, (port signifie col en Basque) .

Nous y arrivons en découvrant les contreforts des Pyrénées: montagnes vertes et raides, cônes pointant souvent dans les nuages très bas. Les portes d’entrée datant du Moyen-âge sont bien visibles et la rue centrale piétonne est remplie de pélerins, enfin la journée tandis que le dimanche soir même à 20h., il n’y a pas âme qui vive, presque aucun restaurant ouvert.

St-Jean- Pied-de-Port était une plate-forme commerciale du Moyen-âge et lundi 15 mai, Pierre-Olivier part sur ce passage des Pyrénées qui était la voie reliant Bordeaux et les autres grands ports ou villes françaises à Madrid. Les Celtes, les Romains, Charlemagne, Napoléon, des milliers de pélerins, de voyageurs, de soldats ont emprunté ce passage, le plus aisé pendant longtemps.

Plus prosaiquement,  parti seul,  à son rythme, il abat les 1200m. de dénivelé sans  se presser. Le bonnet, les gants, le gilet supplémentaire rajouté le matin dans le sac, tout a été utilisé dans la pluie et le brouillard.

Arrivé très tôt à l’hospice de Roncevaux en Espagne, il annule sa réservation pour la nuit et rentre en taxi partagé pour me déclarer:  » nous devons revenir, le brouillard ne m’a pas empêché d’être enthousiasmé par le paysage » . Les averses ont été  aussi fortes qu’imprévisibles ces deux derniers jours;  le lendemain nous roulons jusqu’au col d’Ispégui, et le soleil revient.

Nous apprécions Espelette, village lumineux à l’architecture Basque, ses spécialités  de fromages de brebis et confitures de cerises noires, chocolat, gelées et autres préparations au piment d’Espelette, le vin local Ereguely et admirons les beaux cotons tissés.

Espelette
Ainhoa

Lors de notre retour à Cahors, nous nous arrêtons à Albi, nouvelle couleur après les villages de pierres blanches du Quercy, ocres plus au sud et les façades peintes en blanc avec volets colorés du pays Basque. Cette ville, construite à base du sable du Tarn, est en briques rouges. Son imposante cathédrale, destinée à affirmer le pouvoir ecclésiastique de l’archevêque est vraiment imposante, je la ressens même comme oppressante.

Finalement, notre dernière étape sera de fêter l’anniversaire de Pierre-Olivier à Sauzet, une petite auberge perdue. En mode visite, la gastronomie de la région est plus difficile à  supporter qu’en mode pélerin, il est temps de rentrer. Les transports publics disponibles nous mènent par Bordeaux, à Paris où nous avons le plaisir de rencontrer des amis et de visiter l’exposition à la Cité des Sciences sur l’urgence climatique. En dernière étape, nous rentrons dans nos Alpes retrouver notre fille et sa famille chez nous.

Chemin de Saint Jacques de Compostelle: de Figeac à Cahors, 6- 10 mai 2023

Après un bon mois en route, nous n’utilisons aucun pansement, n’avons aucune courbature, juste chacun l’un ou l’autre petit point faible se manifestant épisodiquement le soir, vite oublié une fois en route. Et le matériel ? Rien en trop, si ce n’est le costume de bain, jusqu’à maintenant. Nos chaussons de tissu comme seconde paire de chaussures sont un inconvénient dans les rares gîtes où les sacs et souliers doivent être laissés dans un local nécessitant de passer par l’extérieur pour rejoindre les dortoirs. Par contre, le matériel s’use et le ruban autocollant très solide embarqué en cas d’éventuel accroc à un sac à dos s’avère bien utile pour réparer nos pantalons.

Réparation nécessaire des pantalons qui se déchirent

Après plusieurs colmatages de la dernière chance, ceux de Pierre-Olivier finiront quand même à la poubelle, et mes deux paires sont l’une complètement distendue et l’autre raccomodée à la bande autocollante. Le vieux dicton de nos mères disant que les tissus ont besoin de temps de repos pour durer semble bien correct.

Donc en pleine forme, nous optons pour la vallée du Célé parmi les trois itinéraires possibles (autres: Rocamadour, Gr 65).

Nous démarrons le long de champs et de passages en forêts par une journée devenant de plus en plus chaude. Avant Espagnac, la forêt est sombre, beaucoup de grosses branches sont recouvertes de mousse et nous avons vraiment l’impression de traverser une forêt terrifiante, tirée des contes de fée. Nous apprendrons plus tard que ces branches mortes sont celles de buis, dévasté en 2018 par la pyrale du buis, dont les chenilles,  mangent toutes les feuilles. A cela s’ajoute une longue couleuvre de plus d’un mètre vue sur le bord de ce chemin humide surplombant le Célé. 

A Espagnac, nous pique-niquons dans le jardin du prieuré et commençons à voir les falaises de calcaire typiques, bordant les méandres du Célé.

Nous arrivons à notre camping au bord de la rivière dans l’après-midi et sortons le costume de bain ! L’eau est terreuse, pas de baignade mais il fait une chaleur estivale; suivront des pluies diluviennes le soir et de bons coups de vent. Juste rentrés dans notre petit mobil-home, ceci nous rappelle quelques souvenirs de camping. Le chemin (Gr 651) passait au-dessus des forêts raides surplombant le Célé, en-bas des falaises. Nous devions rejoindre ce parcours panoramique par un sentier raide entretenu par les gérants du camping.

Malheureusement, le lendemain, le sentier est déconseillé suite à l’orage. Toutefois, deux kilomètres plus loin, nous retrouvons le GR651. Le programme des prochains jours est de monter au-dessus des falaises sur le Causse (plateau calcaire) et de redescendre entre deux falaise au prochain village et ainsi de suite. Les dénivellés ne sont toutefois pas élevés, les chemins sont bien caillouteux, souvent bordés de buis et d’une variété d’autres arbustes. Le Causse est vert, prairies et haies, buis, chênes verts, forêts denses, une sorte de maquis impénétrable.  Le paysage est vaste, la météo agréable, l’air au fonds de la vallée est par contre très moite. Ce deuxième jour, notre marche est ralentie par une véritable invasion de chenilles suspendues par leur fil aux  branches de chênes verts. Totalement inoffensives, nous n’aimons quand même pas les avoir sur nous, nos habits. Nous nous nettoyons mutuellement très souvent et devenons de plus en plus habiles pour les repérer et progresser en cassant les fils avec nos bâtons.

Observées par les randonneurs que depuis quelques jours, nouveauté pour notre hébergeuse bien de la région, il s’agirait selon mes recherches de la tordeuse verte du chêne, défoliant les chênes verts. En tout cas, il ne s’agit pas de la pyrale du chêne, chenille descendant le long des troncs et urticante. Nos petites chenilles vertes sont inoffensives pour l’humain, testé pour vous par les pèlerins !

Balayage anti chenilles

Nous descendons à Marcilhac-en-Célé, joli village sans aucune vigne et apprenons que le vin apprécié venait d’un autre village proche: Marcillac ! Le temps d’une grosse averse nous fait découvrir un café associatif, principalement anglophone, le chemin est parcouru d’initiatives sympathiques. Nous remontons évidemment immédiatement à la sortie du village sur le Causse pour redescendre à Sauliac. Le gîte est une maison récente croisée avec une cabane, les deux dortoirs de l’étage donnant sur une pièce centrale fermée du côté vallée que par du plastique transparent. 

La vue est plongeante sur la vallée et les falaises de l’autre rive. Hébergeuse ayant fait le chemin, construction insolite, voyages en Asie pendant la fermeture hivernale, dans ce pays vert et humide, les toilettes sèches présentées comme un engagement écologique me laissent un peu songeuse. Les modes m’apparaissent plus puissantes pour promouvoir les innovations que les études d’impact objectives.

Le lendemain, en chemin, nous visitons les grottes de Pech Merle où nous admirons des peintures rupestres datant certaines de plus de 25000 ans. Mammouths, chevaux, bisons et un ours sont peints avec du charbon de bois et des oxydes de manganèse et de baryum pour le noir et des oxydes de fer pour le rouge en jouant aussi avec le relief de la roche.  Des mains sont peintes avec la technique du pochoir, des empreintes de pas sont bien visibles. Un éboulement a fermé l’accès à toutes les salles, il y a plus de 12000 ans, préservant ainsi ce site, découvert par 3 adolescents expérimentés en 1922. Le réchauffement climatique menace de les abîmer; leur accès, déjà limité, pourrait devenir interdit au public à l’avenir.

Cette pause culturelle intéressante et émouvante nous fait arriver juste à temps à Saint-Cirq-Lapopie, village perché très connu pour son cachet, mais où seulement une poignée d’habitants vivent à l’année.

Raccourci par l’ancienne voie de chemin de fer pour traverser le Lot pour aller à St Cirq Lapopie
Chemin de halage
Art mural sur le chemin de halage
St Cirq Lapopie

Nous apprécions que dans cet endroit hyper-touristique un vrai gîte soit disponible, géré par la patronne d’un restaurant bien sympathique, offrant un accueil pélerin trés correct. Le dortoir est petit, 4 lits, mais rien à faire, Pierre-Olivier n’est pas un colocataire tolérant les ronflements genre « Grande Vadrouille », alors qu’il est partout ailleurs un excellent dormeur. La soirée est rigolote, en compagnie de quatre copines belges, que nous aurons peut-être l’occasion de revoir. Ces derniers jours, les autres marcheurs allaient de Figeac à Cahors exclusivement, contacts sympathiques mais différents de ceux partagés avec des pélerins au long cours.

Rendez-vous le lendemain, dernière halte avant Cahors, chacun gère au mieux cette journée prévue pluvieuse l’après-midi. N’ayant pas visité le village la veille, nous nous y baladons et partons les derniers; et donc serons plus longtemps à nous faire tremper, sautant même le pic-nic par manque d’abri. Vraiment malheureusement, je trébuche sur le chemin caillouteux, comme la plupart des chemins de cette aventure, alors qu’il est plat et sans difficultés. J’ai mal au poignet gauche, mais il reste 5 km sous la pluie battante et de la descente, par chance non glissante. Nous arrivons au gîte avant son heure d’ouverture, mais au vu des pélerins trempés arrivés en avance, l’hébergeuse ouvre, nous fait du thé et s’organise pour le repas à l’intérieur plutôt que dans la cour pour ses 23 pélerins alors que son maximum habituel est de 15. C’est ainsi cette année, tous les hébergeurs sont débordés, le chemin est victime de son succès. Comme je ne peux plus du tout utiliser mes doigts, le lendemain, le 10 mai, nous marchons juste les deux kilomètres nous menant à l’arrêt de bus pour Cahors, direction hôpital. Nous ne le savons pas encore, mais notre chemin de Compostelle est terminé pour cette fois, je ressors avec un plâtre trop important pour continuer. La suite du voyage est à réinventer.

Chemin de Saint Jacques de Compostelle: de Saint-Chély-d’Aubrac à Figeac, 28 avril-5 mai 2023

Chemin faisant, nous goûtons de délicieux farçous, omelettes aux feuilles de blettes et oignons, sur une petite terrasse en pleine nature.

La descente continue pour arriver à St-Côme-d’Olt connu pour son clocher flammé, c’est-à-dire volontairement vrillé, afin de diminuer l’impact du vent.

Nous flanons dans ce petit bourg médiéval, mais de bonnes montées sont au menu de l’après midi, jamais longues, mais raides, le chemin passe par un point de vue (avec statue de la Vierge) dominant Espalion. Pour nous, une étape à l’hôtel de France, vraiment régénératrice. Dormir dans de vrais draps, chambre climatisée donc absolument calme, ce petit hôtel surpasse nos attentes, avec en sus la découverte du  vin de Marcillac, où nous passerons d’ici quelques jours.

Le lendemain, pause de midi à Estaing, un village médiéval connu, se retrouver au milieu de touristes non pèlerins est nouveau pour nous, par chance ils sont très peu nombreux.

C’est aussi notre première traversée du Lot, nous retrouverons cette rivière à maintes reprises, et aurons de belles montées et descentes entre chaque passage, alors je rêve d’être un canard, ou je me demande si le bourdon (bâton du pélerin) ne pourrait pas servir de pagaie pour diriger un radeau…

La végétation évolue, les chênes et les noyers sont nombreux. En ayant perdu de l’altitude tout en allant vers le sud ouest, les fleurs, la verdure des arbres, les jardins nous projettent en avant de plusieurs semaines.

Le prochain gîte est formidable, maison de pierres avec une vue sur les prairies et vallons infinie, une cuisine du terroir, des lentilles, un gâteau de St-Jacques pour encourager ceux qui s’y rendent et pour que les autres l’aient goûté, des conseils, explications pour l’étape du lendemain, de petites chambres à deux… Tout ceci tenu par un pince-sans-rire bourru au premier abord, mais plein d’humour  venant du Chablais. Les caquelons à fondue sont bien exposés, la confiture est aux abricots du Valais; sous une allure de baba-cool, Léo est d’une efficacité et d’un professionnalisme exemplaire (gîte de Fonteille).

Le 1er mai, nous arrivons assez tôt à Conques, une halte absolument superbe.

L’abbatiale romane de petite surface a une hauteur de plus de 40m. à l’intérieur, et qui lui donne une impression de grandeur incroyable. Le village est niché dans une vallée boisée raide, les moines désiraient s’isoler de la civilisation. Après la bénédiction des pélerins, la présentation du tympan, la sculpture au-dessus de la porte d’entrée, par un des moines est connue sur radio Camino, tant ce moine est un acteur hors pair, ayant de l’humour. Pour moi, il représente la personne qui pourrait intéresser n’importe quelle classe à tout sujet. Le tympan, séparation entre l’extérieur et l’intérieur comme celui de notre oreille, représente le jugement dernier; à gauche le paradis, à droite l’enfer; entre les deux une balance qu’un malin essaie de biaiser du côté dantesque. Nous n’aurions jamais vu l’avare dévoré par un serpent alors qu’il tient sa bourse, le roi trop imbu de sa personne humilié par une femme, l’ordre pacifique du paradis et tant d’autres détails sans ses explications et ses mimes des postures sculptées.

Le public, essentiellement des pélerins, aurait pu l’écouter des heures sur le parvis, l’orateur était tout autant frustré de ne pas nous en dire plus, mais un autre moment magique nous attendait à l’intérieur de l’abbatiale: deux femmes s’accompagnant  parfois du violon et du violoncelle chantent en béarnais, une langue occitane. Sans micro, leurs voix résonnent entre ces vieux murs de façon parfaite, franchement merveilleux.

La soirée continue par l’illumination en couleurs du tympan, détail après détail, couleurs très vives comme l’étaient également les couleurs d’origine (plus ternes en enfer qu’au paradis). 

La soirée avait déjà bien commencé car le restaurant de notre auberge de St Jacques était vraiment gastronomique. Le charme des vieilles poutres et la salle de bains mansardée de notre chambre sont une source de risques nécessitant une bonne gymnastique vu que nous ne sommes pas des lilliputiens, mais la vue sur le clocher l’emportent largement sur ces inconvénients. Le lendemain matin, nous visitons l’étage de l’abbatiale avec des explications sur les vitraux de Soulages, controversés, ayant remplacé les vitraux classiques colorés. Modernes, constitués de lignes noires sur fonds blanc, taillés dans des morceaux de verre compressés pour changer de nuances de blanc selon la lumière sans aucun reflet sur la pierre, leur but est de mettre en évidence la beauté de la pierre, d’éclairer l’église sans y ajouter de couleur, et de ressembler aux parchemins fermant les fenêtres avant l’époque des vitraux. En tout cas, cette abbatiale est lumineuse et le regard est porté sur  les pierres des murs et non sur les vitraux.

Par monts et par vaux, de forêts en prairies, de montées et descentes boueuses un peu glissantes, notre Camino, facteur économique essentiel pour la région, nous amène à Decazeville pour une halte de midi par beau soleil, bien différente: ville minière d’extraction du charbon jusqu’en 2001, créée de toutes pièces vers 1800, dont la statue  rend hommage au patron de la sidérurgie de l’Aveyron et où une usine à encore fermé récemment….. Maisons en décrépitude le long d’un axe routier, mais aussi ville ayant abrité un festival de Street Arts donc riche en fresques murales, échoppes tenues par des jeunes, immense hall qui était le laminoir des usines produisant l’acier transformé en hall de patinage, skate, roller. On y sent un vent propice à l’innovation. Le Chemin y passe, détourné pour offrir de quoi dormir et se restaurer aux passants, autre tentative pour relancer un aspect économique. Nous prenons bien du temps, il fait chaud, les commerçants sont très accueillants, mais un coup de chaleur gratifie les grimpettes de l’après-midi, nous arrivons bien fatigués à l’étape.

Arrivée à Figeac

Qu’importe, la prochaine sera courte, 20 km avalés le matin, nous menant à Figeac, bourg médiéval que nous apprécierons bien de visiter aussi le lendemain.

La réservation des hébergements futurs prend aussi du temps, vu que beaucoup sont complets mais nous arrivons pour le  moment à nous organiser systématiquement des étapes de 20 à 26 km. 

En se promenant, Pierre-Olivier s’enfile sans crier gare chez une coiffeuse, l’heure de la tonte a sonné ! Grâce à ce coup de tête, nous passons de bons moments sympas chez cette jeune maman venant d’ouvrir, les amis de Figeac passent lui dire bonjour,  du coup je passe aussi sur le fauteuil et nous allons souper au restaurant adjacent, chez ses beaux-parents. C’est tellement joli et sympa, et notre hébergeuse n’étant pas venue faire le souper comme prévu, que nous y retournons le lendemain. Nous sommes reçus comme des amis, des vieux clients, pourtant le personnel est débordé: c’est la fête annuelle, les Figeacois sont de sortie, manèges et musique dans la vieille ville. Quelques pélerins arrivent tard, surpris par l’ambiance, arborant les mêmes souliers que nous qui avons fait le choix de n’avoir que ceux de marche, même pour sortir ou aller chez la coiffeuse !

Montagne d’asperges

Après une soirée sympathique en compagnie de chansonniers francophones, nous rentrons dans notre « loge de concierge », un studio au rez donnant sur la rue passante, dont la porte et la porte-fenêtre se ferment à double tour, pour un peu d’air, vous repasserez !

Marcher sur le chemin, c’est simple, changer d’hébergement en ne sachant jamais à quoi s’attendre, c’est plus compliqué ! Nous sommes vraiment contents d’avoir pris le temps de parcourir la vieille ville moyenâgeuse (circuit découverte indiqué par l’office du tourisme) en restant deux nuits à Figeac. Les rues abritent de nombreux hôtels particuliers de marchands, aux façades sculptées témoignant de leur richesse, et des maisons d’artisans à encorbellement en bois.

Chemin de Saint Jacques de Compostelle: de Puy-en-Velay à Aubrac , 22-28 avril 2023

La cathédrale du Puy-en-Velay a été agrandie au 12ième s. alors qu’elle était construite sur la pente d’un ancien cône de lave. Les architectes du 12ième s. ont eu l’audace de l’agrandir en sur-plomb, tenant sur des piliers. Les maisons adjacentes masquent ce profil, mais l’imposant escalier menant de la vieille ville à la cathédrale y donne accès en arrivant par une sorte de grande trappe. Il n’y a aucune porte à l’emplacement habituel de l’entrée, elle donnerait dans le vide. Le samedi 22, jour de notre départ, cette porte-trappe était ouverte,  sortie réservée aux pèlerins, gardée souvent fermée à cause du froid qu’elle amène (et tous ces moines, pèlerins etc…. vivaient déjà bien au frais !) Nous quittons donc la cathédrale de façon très conforme, mais faisons un crochet au marché pour nous approvisionner en fromages et, disons, là, au revoir à ma cousine.

Vite un peu en hauteur, nous admirons les vastes étendues du plateau basaltique. Un peu de bétail, des champs de céréales et de lentilles, spécialité de la région, un sol bien caillouteux, nous progressons sur de beaux chemins bordés de murets en pierre sèche et de prunelliers en fleurs. Bien blancs, ravissants, il paraît que leurs petites prunes vertes ne sont bonnes qu’à produire de l’alcool.

Le paysage est vaste, sans avoir du soleil, nous avons au moins la visibilité et marchons au sec jusqu’à notre gîte. L’ambiance sur le chemin et à l’étape est complètement différente depuis le Puy-en-Velay. Au lieu de voir 2 pèlerins, nous en voyons plus d’une dizaine, au lieu de manger seuls avec nos hébergeurs, nous soupons une vingtaine autour de la table. A chacun son chemin avait été la devise donnée à l’apéro d’accueil des Pèlerins la veille, à la cathédrale du Puy en Velay. Autour de la table à Montbonnet, des Coréens assez perdus pour réserver leurs gîtes suivants se faisant immédiatement aidés, une dame reprenant la marche par petites étapes après quelques dizaines d’années, un magnétiseur refaisant le chemin car il a trouvé la Foi à St-Jacques et aimerait mieux comprendre ce qui lui arrive, des jeunes mamans parties entre copines plus bavardes les unes que les autres, un couple de Hollandais très sympathiques et positifs ayant l’habitude des longues randonnées, très calmes … une aubaine, nous partageons la même chambre.

Le lendemain matin, les dômes des anciens volcans et les grands plateaux sont bien visibles, la grande fenêtre du gîte est un endroit idéal,… sauf pour le chauffage…. on doit être devenus douillets.

Nous continuons par ces jolis chemins sur les Monts du Devès  pour finalement descendre vers l’Allier par un sentier de forêts, par chance assez sec. Bien des églises romanes jalonneront notre chemin, comme celle de Saint-Privat d’Allier.

Une vue panoramique de la chapelle de Rochegude et encore une descente terreuse jusqu’à Monistrol d’Allier, vraiment au fonds d’une vallée encaissée. Même ambiance chaleureuse au gîte tenu par une infirmière reconvertie s’étant occupée de ma maman, à Ecublens, et une bonne grimpette au-dessus de l’Allier pour retrouver les grandes étendues. Nous quittons les dômes basaltiques pour entrer sur le plateau granitique.

Sur le chemin, un homme de la région nous vend une sorte de pavé de fruits secs agglomérés, c’est délicieux. Il est dans une position très stratégique, juste en-haut de la côte et fait déguster; le chemin à de tout temps été un important lieu de commerce !

Les forêts sont tantôt des feuillus, n’ayant encore aucun bourgeon, tantôt de l’épicéa planté comme toujours pour sa croissance rapide, des sapins et toutes sortes de pins. Nous admirons toujours sans nous lasser les haies bien fleuries et le paysage ouvert de plateau de la Margeride. Nous progressons bien sur cette bonne étape, 24 km et bien 800m. de dénivellé positif nous menant à Villeret d’Apchier. Le soir, ambiance animée, pas vraiment calme et zen, chacun est sur son téléphone pour trouver les hébergements suivants. Plus de fréquentations que l’année dernière à même époque, un engouement post covid important, difficile de respecter l’esprit du chemin qui serait de vivre et s’organiser jour après jour. Nous observons et profitons toujours de beaucoup d’entraide pour se montrer les différentes applications et se prêter le guide. Nous n’avons rien comme papier, ni guide, ni carte, pour éviter de s’alourdir, la référence est le « Miam-miam Dodo », expression latine utilisée par les moines. Après cette soirée bien administrative, nous serons plus relax, ayant nos logements pour une semaine.

Mardi 25, nous continuons à traverser  la Margeride, les prairies sont de plus en plus riches en tapis de jonquilles, nous nous sentons parfaitement bien en pleine nature.

Nous faisons halte au lieu dit « Le Sauvage » vers une énorme bâtisse en grosses pierres, qui nous paraît être au milieu de nulle part mais qui était au carrefour de chemins de commerce au Moyen-âge et comme beaucoup d’églises aussi, un hospice pour les pélerins, les voyageurs, les indigents.

Ces plateaux ont un climat rude, venté, les distances sont immenses, nous imaginons dans quel état de santé certains devaient être recueillis. Actuellement, le site est une auberge-gîte, un site de promotion d’une gestion durable de la forêt et bénéficie de son étang d’épuration.

Le lendemain, nous marchons avec de nouveaux amis, nos étapes sont très raisonnables, une vingtaine de kilomètres, peu de dénivellé, alors nous profitons de faire des pauses au soleil, d’avancer sans se presser.

A Lasbros, nous dormons chez « Marie-en- Aubrac » , un gîte en pierres, très traditionnel, chaleureux,  le bœuf en d’aube un vrai régal, une authenticité remarquable. Évidemment que la gérante connaît la région et a fait le chemin jusqu’à St-Jacques.

Le lendemain, changement de décors, progressivement quelques bois mais plus de forêts, les vastes étendues caillouteuses sont nues.

C’est l’Aubrac !

Une nuit à Nasbinals, nous logeons dans une bâtisse du 19ième s, internat pour garçons (évidemment rien pour les filles) abritant encore quelques classes. Longs couloirs gris, escaliers imposants, un vrai décor de film. L’accueil est assuré par des hospitaliers, bénévoles ayant fait le chemin et nous avons notre chambrette au grenier. Une première ce 27 avril, nous sortons dans le très joli bourg pour souper au restaurant; à l’exception de notre soirée en Mobil-home tout au début de notre périple, c’est la première fois. Il fait beau, on s’est vu en chemin, on se salue, tout le monde mange l’aligot, une purée de pommes de terre mélangée à du fromage frais de vache, accompagnant ou de la saucisse ou du bœuf d’Aubrac. « Radio Camino » parle des deux filles cheminant chacune seule en bivouac qui pêchent parfois, de la famille aux quatre enfants accompagnés de l’âne « Pivoine », du jeune de 17 ans, et même d’une moustache…

Le lendemain, les Mont-s d’Aubrac (1324m.d’alt.), vallonnés, superbes, au son des oiseaux, avec du soleil, la nature immense nous enveloppe. Aucun bétail ou presque, les vaches sortiront des étables vers la fin mai, les nuits sont froides. C’est avec un peu de regret que nous commençons la descente, pour se rapprocher de la vallée du Lot.

Chemin de Saint Jacques de Compostelle: forêts, cerisiers en fleurs et magnifiques rencontres pour rejoindre la rive droite du Rhône, 7- 12 avril 2023

De Yenne, nous grimpons au Mont Tournier par la variante du chemin, ensoleillé et sec, absolument bucolique entre prairies et haies avec de beaux dégagements vers les collines de l’est. Le chemin classique offrant de beaux belvédères sur le Rhône est entièrement en forêt, plus raide, potentiellement boueux, déconseillé en ce moment.  Par une piste VTT bien sinueuse, nous atteignons le sommet, balcon sur le Rhône. La soirée sera très sympathique, chez une paysanne  à la retraite ayant eu 70 vaches laitières. Elle nous parle de la rénovation de cette ancienne bâtisse, les locaux que nous occupons ayant été laissés  à l’abandon, ils abritaient beaucoup d’hirondelles, qui appréciaient les clous plantés dans les poutres provenant de la forge, pour accrocher leur nids.

L’approche de plus en plus écologique était toujours très pragmatique, et l’évolution de certaines façons de travailler, comme la production de leurs propres céréales et semences pour nourrir  leurs vaches ou l’élevage de deux taureaux, à la place de l’insémination artificielle, ont toujours mené à des économies.  Les autres productions maisons sont l’huile de noix, des centaines de kilos cassées pendant les soirées et les confitures évidemment. Nous dégustons des saucisses de Savoie, nommées diots, gratinées avec des crozets, pâtes de sarrasin. Le lendemain, nous les quittons alors qu’ils commencent à allumer le four banal, juste restauré, pour l’inaugurer le lendemain, jour de Pâques.

Après un jour de météo et paysages variables, nous retrouvons avec grand plaisir une amie de Gryon au « Petit coin tranquille » avant les Abrets pour une soirée gourmande fort sympathique au restaurant bien animé du camping familial. Le petit dernier prenant son biberon avant le début du service, dans les bras de sa maman alors qu’elle prend déjà les commandes. Puis il sera installé proche du passage, mis immédiatement au parfum de l’activité familiale. Le tampon pour nos crédentiels était introuvable, pas grave du tout, mais ma foi les fillettes avaient envie de bricoler, et savaient, elles, où il était ! Il fait frais, et le dortoir où nous ne sommes que les trois n’a pas d’accès direct aux sanitaires. Une pensée pour notre hanneton resté chez nous.

Le lendemain sera notre journée défi…. Un challenge imposé par le manque de logements libres et ouverts, une journée de plus de 30 km et 700m de dénivellé positif.

De belles forêts, du soleil, nous avons beaucoup de plaisir à cheminer à trois, jusqu’à la dernière descente, très raide dans un chemin de galets ronds roulant les uns sur les autres pour arriver à Grand-Lemps, et la petite remontée à notre logement chez un couple très chaleureux. Ayant pitié de nous, Pierre-Olivier est amené en voiture jusqu’à l’automate à pizzas.

Les prochains jours, nous longeons de beaux jardins, malheureusement la traversée des villages est jalonnée par les aboiements des chiens derrière les clôtures. Les cerisiers sont en pleine floraison, absolument magnifiques, il s’agirait en bonne partie de griottiers. Nous avons pendant deux jours la vue sur le Vercors et la Chartreuse, au-delà de la vallée de la Bièvre, entièrement domestiquée par l’agriculture, aucun castor n y a plus sa place et la rivière elle-même ne semble plus trop visible.

Nous faisons des rencontres extrêmement chaleureuses en logeant chez d’anciens pèlerins avec le sentiment d’être reçus chez des amis.

Ces bénévoles nous expliquent leur engagement pour la valorisation du patrimoine de leur village, ou d’un site de sources abritant des orchidées entre autres. Ayant sauté une étape parcourue en stop car ma toux m’avait épuisée, j’ai été dorlotée avec gentillesse. 

Nous visitons le jardin en saluant la variété des poules et partageons les anecdotes marrantes de voyage à pied, à vélo, et les souvenirs de camping. Un couple nous chante le chant du pèlerin pour notre départ.

La traversée d’est en ouest de la vallée du Rhône pour rejoindre Chavanay sur la rive droite sera une étape courte mais très désagréable, goudron, petits tronçons le long des barrière de sécurité. Chavanay est au pied des vignes, le parc du Pilat se profile, nous nous réjouissons de grimper par des sentiers.

St Jacques de Compostelle : préparatifs et départ, 31 mars 2023

La balance de cuisine nous instruit, un petit pull tout léger 100g, les polaires 150 à 500g. Au fil des jours, nous refaisons le tri, aucune autre paire de chaussures que les souliers de marche seront admises, les mules en plastique non plus. Pierre-Olivier doit faire le deuil de sa mini cafetière qui avait sa place même dans les sacoches vélo et moi randonner pour la première fois avec une gourde au lieu de mon thermos. L’objectif des 9 kg, avec l’eau et la veste semble atteint, notre pèse personne étant d’humeur variable.

Demontage d’un Scrabble de voyage, pour diminuer le poids du plateau et utilisation d’un autre jeu pour compléter les fiches manquantes.

Vendredi 31 mars, départ pour Bex après la grosse pluie, histoire de sentir que c’est raide par chez nous, aussi vers le bas.

Nos voisins sortent de leur chalet, d’en bas, d’en haut pour nous dire au revoir alors que nous partions les deux sans crier gare, que d’émotion.

Les festivités de départ se succèdent, soirée chez notre fille et sa famille, café chez une amie de longue date le lendemain, puis visite de la vieille ville de Genève,

coup d’œil au St  Jacques du vitrail de la cathédrale avec ma filleule et sa famille.

Un petit air printanier aux bains des Paquis, avant de replonger dans le mauvais temps. Une panne d’électricité à la gare de Genève complique notre arrivée chez les amis qui nous hébergent,  pèlerins des le lendemain, cela ne nous arrivera plus. Nous quittons Carouge dans le calme d’un dimanche matin gris, et rejoignons de belles forêts.

Je suis plutôt malade, bonne toux, notre étape nous paraît bien longue, mais nous apprécions les forêts,

Pélerin dans la forêt

la chapelle Ste Marie à la Chartreuse du Pommier,

la vue sur le jet d’eau lorsqu’on ne s’y attendait plus,

mais pas la pluie avant d’arriver enfin  à Charly, au gîte pèlerin. 

Nous cuisons notre riz pris du chalet agrémenté de l’ail d’ours cueilli en chemin, les pieds posés sur un vieux journal tellement le sol est glacé, comme l’ensemble de cette vieille maison, au charme désuet de certaines mythiques auberges de jeunesse. Les contacts sont toujours l’avantage des gîtes; a-t-on entendu à maintes reprises. Heureusement, nous sommes seuls et pouvons ainsi accaparer les 4 couvertures trouvées. De petites flaques entourent le lit le matin, le radiateur est glacé et coule…. Mais le reste de riz est un très bon déjeuner, et la seconde journée se termine par du soleil.

Desingy

Belles forêts, chemins en balcon, un trajet sympathique mais acrobatique: en équilibre dans la boue, les cailloux mouillés et les racines, zigzagant entre les flaques, le trajet est long jusqu’à Frangy, et plus de muscles semblent avoir été sollicités!

P.-O héritent de quelques-uns de mes virus, à moi le grand air a fait du bien. Notre mignonnette chambre bien proprette nous abrite pour un kebab tiède cherché à la seule enseigne ouverte le lundi soir.

Mardi 4 avril:  prairies et forêts en balcon au dessus de la vallée du Rhône, le ciel est bleu, belles vues mais une terrible bise, un air bien froid, disons pas inadapté pour marcher mais nous avons quelques pensées pour les gants ou un pantalon plus chaud qui n’avaient pas passé le test de la balance. Arrivée au camping de Serrière en Chautagne, logés dans un Mobil home aux murs de papier faux-bois, et au chauffage électrique décor feu de cheminée. Il est propre, juste pas isolé et nous chauffons la campagne toute la nuit.

Le lendemain, nous longeons le Rhône ou souvent un des bras, calme, relaxant, quelques cygnes, berges naturelles jusqu’à Chanaz, petite cité médiévale et touristique au bord de l’eau. De plus, nous sortons le chapeau de soleil, les lunettes et la crème solaire, quel bien ! Après Chanaz, nous grimpons jusque dans les vignes du vin de Jongieux, Gamay que nous apprécions le soir, pour finir à nouveau le long du Rhône jusqu’à Yenne où nous jouons les pèlerins bon vivants, après les pélerins plus naturAListes que religieux, l’une ou l’autre église nous ayant échappé.