Vœux 2037 : lettre à mon petit-fils, pour ses 15 ans

Début décembre 2021, neige exceptionnelle, nous nous réjouissions de t’accueillir.Alors maintenant, 15 ans plus tard,  

Tu nous questionnes, tu nous accuses, as-tu un regard condescendant qu’on pose sur les simple-d’esprits envers notre génération ?

Pourquoi n’avons-nous pas changé notre mode de vie au bon moment ? 

Ignorance ?

Non

Les journaux parlaient réchauffement, Les discussions de salon parlaient empreinte carbone, gaspillage,

La publicité vantait le durable, l’écologique était à la mode, cher et bien vu,

La télévision montrait les ouragans, les inondations et les incendies,

Les médias plus pointus reportaient un rapport du GIEC paniquant. 

Malheureusement les manifestations de jeunes pour le climat apparaissent comme une anecdote de 2020.

Relaté dans les faits divers : un père de famille mène une grève  de la faim devant le Palais fédéral pour obtenir la présentation par les experts du GIEC de leurs résultats à nos élus.

Mais l’attention sur la pandémie est plus forte, la Covid est un tunnel à passer avant de retrouver la route.

Exclus de tout ce flot d’informations, le lien entre la pandémie et le dérèglement climatique. Si mentionné, sa compréhension était plus ardue, dans un discours si difficile à accepter et si bouleversant que cela gênait les convaincus eux-mêmes de le défendre hors de leur cercle. 

Malveillance, égoïsme ?

Profitons pendant que nous pouvons sans penser à demain ?

Non, ce n’était absolument pas la tendance dominante, ou alors juste l’illustration de l’acceptation fataliste d’un condamné, d’un démuni devant un mal qui le dépasse, dont la complexité est telle qu’il ne peut être que spectateur ou victime, en tout cas pas acteur. 

Déni ?

Oui, un peu, beaucoup ? Non passionnément, à la folie mais sans conscience ni intentions. 

L’homme quitte le déni que s’il a la connaissance d’actions possibles.

La soif de connaissances se désaltère en cette période que de prophéties alarmantes, de fin de notre espèce, de déclin de notre monde, allant même à l’encontre de notre instinct de conservation, donc de notre biologie profonde, les rendant inacceptables, inimaginables. Un discours ressemblant celui de la pseudo-science galvaudée par des extrémistes et des sectes de tout bord, à ignorer par celui qui veut rester rationnel. Le déni est juste un outil de notre instinct de conservation. 

Quelques retraités ayant le temps, se triturent les méninges, lisent « hors chemins battus » et découvrent d’autres connaissances .Celles qui expliquent que l’effondrement prédit une série de catastrophes évolutives, donc moins facilement identifiables. Et si le feuilleton avait déjà commencé ?

La pandémie, un tunnel isolé à passer ? Non, une étape de l’effondrement dans les futurs résumés d’histoire du 21ième siècle. 

Les démocraties gardent une certaine honnêteté, mais leur lenteur de décision  s’accommode bien du déni nécessaire pour ne pas sombrer dans la folie.

Les révolutions, si loin de notre culture, ont l’efficacité et le dynamisme nécessaires aux changements requis mais auront toujours un coût, en souffrance, en martyrs. Serons-nous passés par là ?

Les dictatures gardent leur irrespect de l’humanité. Peut-être en dernier recours, aurons-nous à passer par cette étape ? Utopique, et bénéfique si transitoire et basée uniquement sur des valeurs écologiques. 

Alors devrions-nous être encore plus fatalistes ?

Non, au contraire, nous sommes dedans et quoiqu’on n’en dise, pour beaucoup d’entre nous, nantis, nous y vivons des moments heureux, nous y partageons de belles aventures. 

Le Covid, un arrêt forcé ?

Notre grand tort est de se concentrer sur les possibilités perdues plutôt que de se concentrer sur les opportunités de repartir autrement, par de minuscules changements, petites contraintes, mais grande nouveautés potentielles. Juste de quoi nous convaincre que nous avons une pagaie pour quitter le fil de l’eau dominant, menant à des réelles découvertes, donc des projets et l’action individuelle, bienfaitrice par définition, nous écartant de la rancune, nous tournant vers le futur avec intérêt.

L’individu ne peut agir seul, culpabilisé ou non.

Alors quelles actions sociétales étaient en route ?

Oui, le recyclage s’épanouissait , à défaut de la non-consommation.

Oui la production de tout ce que nous utilisions, mangions, consommait moins d’eau, moins d’énergie et émettait moins de CO2 par unité que quelques décennies précédentes, mais leur  production absolue fleurissait.

Oui , la publicité pour les voitures électriques portait ses fruits.

Oui les pistes cyclables se sont dessinées au rythme de l’expansion de la pandémie  

Mais quel était l’impact global ?

Faible, alors était-ce utile ?

Oui, car qui dit acteur dit plaisir à contribuer, et surtout à sortir du déni,  à accepter la flexibilité, l’innovation, la créativité, qui seront les nouvelles valeurs, accepter d’être freiné par différents murets à passer, dont un s’appelle Covid, plutôt qu’à éviter les murets pour aller directement s’écraser dans le gros mur final. 

Alors courbe ou virage serré en extrême urgence ?

Plus le temps passe, plus de monde est prêt à quitter la ligne droite. Les restaurants refusant le pass sanitaire l’ont réclamé deux mois plus tard. Alors agir vite, pour s’habituer à de petits virages, en concrétisant  des miettes de solutions nous permet d’être acteur, d’avoir des projets, de partager, ce qui est l’action la plus vitale. La solidarité et non l’individualité éclôt en période de crise, selon des études historiques épidémiologiques.  

Nos actions que nous te dédions, ainsi qu’à ta soeur nous permettent d’agir plutôt que de subir, d‘entrer dans un monde de transition, soit par une porte bien discrète encore, de voir les obstacles comme des petits murets plutôt que des coups du sort et ainsi de garder le dynamisme nécessaire à la joie de vivre, et espérons de partager un petit bout de chemin avec vous deux dans la bonne humeur.

Nous agissons et combattons le déni actuel mais l’acceptons partiellement comme bouée de sauvetage. Ouvrir les yeux, accéder à la connaissance totale actuelle, la considérer, fermerait presque tout espoir et serait totalement incompatible avec notre instinct de conservation. Notre vie autant que notre compagnie deviendraient insupportables.  Espérons que les lacunes de connaissance soient comblées positivement et que l’incroyable adaptabilité de l’humain soit encore sous-estimée.  

Et si tu as à ce jour des griefs envers nous, et si je suis là pour les écouter, c’est qu’au moins une porte vers la maison de ta grand-maman sera encore debout pour être ouverte et pour partager un bon moment autour d’une table, d’un verre, d’une discussion, d’un gâteau, bienvenue à toi et à ta sœur !