Camino Norte, San Sebastian, Bilbao, Santander, 8-17 septembre 2023

Départ tôt le matin de San Sebastian par la plage. Une  première:  Pierre-Olivier démarre sa journée sans avoir bu son café. La chaleur nous rend matinaux, mais les cafés et restaurants étaient eux plus vivants la veille au soir pour nous servir des tapas de délicieux poivrons entre autres. Après 1h30 de marche, nous pique-niquons pour déjeuner, vers 9 heures. Vergers, prairies, bétail, nous cheminons sur un chemin en balcon à environ 200 mètres au-dessus de l’océan.

Après un arrêt à une buvette tenue par des bénévoles indiennes très dévouées, le chemin rejoint Zarautz, station balnéaire aux grands immeubles bordant la plage, suivie d’une route en corniche,  où le goudron par plus de 30 degrés anihile l’appréciation de la vue, avant d’arriver à Getaria.

Le gîte est à l’entre sol
Tentative de séchage au bord du carrefour

L’auberge de pélerins est un rez de chaussée d’immeuble, long dortoir avec juste une imposte, lits superposés fermés chacun par un rideau…. 100% d’humidité dehors, idem dedans avec moins d’air. Malgré les avertissements très clairs du  gérant concernant l’impossibilité de sécher quoi que ce soit par cette météo, en bon pélerin, nous nous mettons à la lessive, puis partons pour une trempette dans l’océan vraiment tempéré.      

Ma découverte du jour: le moyen le plus rapide de sécher mon pantalon est de le remettre mouillé juste après l’avoir lavé. En marchant, il sèche vite alors que toute autre tentative de séchage est une perte de temps.

De Getaria à Deba, belles forêts, belles prairies, belles vues sur l’océan puis nous décidons de prendre le Camino classique. C’est vert, beau mais la descente sur Deba est extrêmement raide et nous regrettons de ne pas avoir pris le chemin côtier, comme ma cousine. Nous admirons quand même les couches de schiste plissées et érodées affleurant l’eau ou s’élevant verticalement en falaises bordant l’océan

A Deba, faute d’avoir pu réserver dans une auberge pour pélerins, j’avais trouvé un appartement;  grande surprise: nous logeons dans le plus bel immeuble de Deba, avec un très grand balcon. Décision est immédiatement prise d’acheter du souper au lieu d’aller au restaurant, notre balcon est trop incroyable. Nous rejoignons la plage par un jeu d’ascenseurs, je me baigne puis vais aider Pierre-Olivier à ramener les courses. Soirée souper froid sur terassse de luxe. Nous avons une chambre de trop mais ne retrouvons malheureusement pas le pélerin allemand rencontré ce jour pour la lui proposer. Jadis important port de commerce exportant la pêche et la laine vers les Flandres et l’Angleterre, Deba a gardé le charme d’une petite localité, c’est samedi les familles sont à la plage.

Le jour suivant nous mène par forêts, prairies, vues sur les collines bien vertes et finalement descente bien boueuse à Markina Xemein. La journée a été un peu moins chaude, le thermomètre de la rue reste à 28 degrés toute la soirée et la nuit est étouffante, mais nous logeons dans un appartement de la vieille ville rénové par un artiste, décidément le Camino nous réserve des surprises. C’est assez rare de disposer d’un livre présentant les photos des lampes, petites tables design et en même temps de les utiliser pour… poser les chaussettes du pélerin.

Les belles forêts,  les bonnes montées continuent par la suite, arrêt au monastère de Zenarruzako , descente si raide que des passerelles d’escaliers y ont été installées, chic cela nous sauve de la boue glissante pour atteindre une buvette servant des pains grillés à la tomate, et des tortillas mais ceci est une évidence: c’est ce que nous pouvons manger partout et en tout temps ! Le chemin de forêt est charmant mais long, 27 km avec un dénivellé positif et négatif d’environ 800 mètres pour atteindre Gernika.

La ville met en évidence le bombardement de 1937 par l’aviation allemande, qui appuyait les troupes de Franco; ma cousine et moi ressentons une certaine grisaille,une lourdeur triste bien que les rues aient été très animées jusque tard le soir.

Le trajet pour Bilbao nous fait traverser les monocultures d’eucalyptus, quel désastre ! Nous observons de près, même de si près que notre chemin se perd dans les traces des engins, l’abattage, l’élagage et la coupe des eucalyptus par une seule machine de taille modeste. Ces arbres modifient le sol et pompent l’eau des nappes phréatiques profondément, autant ils sont agréables en forêt mélangée, autant nous sommes là devant une aberration écologique.

Je finis l’étape en bus, comme prévu alors que Pierre-Olivier rejoint Bilbao à pied, bien fatigué de s’être rajouté 15 km de goudron.

Bilbao: ville surprenante, ville post- industrielle muée en ville culturelle, un peu hétéroclite avec des bâtiments art nouveau, une  vieille ville trés animée où il fait bon pour être dehors jusque vers 22 heures. L’architecture du musée Guggenheim nous enthousiasme suggérant un cargo, référence à la construction navale, piler économique dans le passé. Les collections exposées par contre sont intéressantes mais ne nous réconcilient décidément pas avec l’art moderne (Yayoi Kusama).

De Bilbao à Santander, nous marchons la plupart du temps sur de petites routes sans trafic ou parfois le long de plages magnifiques. Certaines comme celle de Castro Urdiales sont bordées d’immeubles, mais celle avant Noja est bordée de maquis, nous y faisons un arrêt baignade bien mérité après l’étape de la veille. En effet, à Castro Urdiales, nous logions au milieu de la rade alors que la vieille ville déterminant le début de l’étape jusqu’à Loredo est 2 bons kilomètres plus loin. Le matin, nous longeons donc la plage une paire de kilomètres, tête branchée sur 32 km, pour arriver à la borne « Loredo 34 km » , puis une fois sortis de la ville à une borne de peinture plus récente « Loredo 35 km » ! Nous tenons un bon rythme, l’humeur n’est plus à la contemplation, pour arriver à Liendo où nous comprenons que la fin de parcours à été modifiée pour emprunter un chemin de côte, plus long, avec bien du dénivellé mais plus beau. Suivant les indications d’une locale et pour garder l’étape à 35 km (mieux que 39!) et 800 mètres de dénivellé, nous suivons l’ancien tracé, décor déprimant de hameaux mal entretenus, sur fonds de bruit d’autoroute et atteignons Loredo vers 18 heures.

Notre vie est un peu plus compliquée sur ce camino que lorsque nous cheminions en France. Les auberges municipales ou paroissiales ne peuvent pas se réserver, de plus nous appréhendons les grands dortoirs, surtout par nuits très chaudes. Dans nos différents hébergements, chambre chez particulier, appartement, pension, auberge de pélerins privée, donc réservable, ni le déjeuner ni le souper ne sont proposés. Nous devons donc sortir le soir trouver un café proposant un plat, (le menu du jour n’ est souvent servi qu’à midi), se mettre aux tapas délicieux mais n’étant pas à même de ravigorer un marcheur en fin de journée ou encore commander une grande salade, délicieuse et souvent très copieuse mais ne correspondant manifestement pas aux habitudes locales. Nous nous régalons de calamars également ou prenons plaisir à un petit déjeuner en terrasse à Santana, le samedi matin comme bien des familles du coin. La campagne est bien verte, beaucoup de chevaux, chèvres, vaches parfois dans des pâturages surplombant la mer, aux roches karstiques apparentes. L’architecture en général et les fermes n’ont aucun charme, elles sont parfois entourées d’objets non débarrassés. Marcher sur le goudron, hameaux mal entretenus, parfois bruits de l’autoroute mettent à mal la motivation, même si nous sommes heureux d’être partis, de revivre cette expérience de vie de nomade à pied. Le paysage doit-il être toujours beau pour apprécier l’expérience, sauter les tronçons trop urbains pour garder majoritairement de bons souvenirs ou vivre l’expérience d’un cheminement purement à pied sont l’objet de nos méditations. Nous optons pour la sortie de Bilbao et celle de Santander en transports publics.

Le dernier tronçon le long des côtes avant Santander est splendide, l’arrivée en bateau permettant de traverser le Rio de Solia une jolie expérience.

Encore 3 km de ville pour arriver dans un mini hôtel hyper fonctionnel, hyper propre, totalement déshumanisé, rendant le téléphone portable indispensable. En fait quelques chambres sur un étage d’immeuble accessibles par code. Auberge pour pélerin robot ? Nous sommes un peu désarçonnés. A l’intérieur d’un petit hall, 6 key boxes avec les clés des chambres. Nous y avons  très bien dormi après un repas, au café péruvien du coin, petite arrière-salle, en compagnie d’une joyeuse et jeune tablée gérant l’écran TV géant mais l’ayant éteint pour la prière avant leur repas.

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