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Retour à l’Est et au Canada, du 16 au 31 juillet.

Nous traversons les grandes plaines vers l’est, quelques formations rocheuses, puis de l’agriculture et de l’élevage, le pays est vert!

Après la descente du col de Beartooth, nous nous mettons en route pour 2 jours et demi de route sans visite, « avalant » jusqu’à 780 km d’une journée.
Nous rendons visite à Carmen, venue quelques jours chez nous dans le cadre d’un voyage d’étude avec sa classe de français il y a une douzaine d’années. Retrouvailles dans sa belle maison de Bayfield, une petite station sur la rive sud du lac Supérieur. Ambiance de vacances, terrasses, une boutique de glaces « home made » incroyable, petites maisons blanches et beaucoup de cultures de fraises, et de vergers de pommiers et cerisiers. Le temps est bien chaud, certains se trempent même dans le lac, l’air très humide convient encore mieux que la normale aux moustiques, réputés déjà bien établis dans les état du Wisconsin et du Minnesota.

Nous nous baladons le long des rives, le sol est sablonneux et les berges s’érodent fortement malgré les arbres. La forêt est dense, une vraie jungle.

Ici les ours noirs sont chassés, l’espace est immense relativement à la présence humaine, donc les promeneurs ne les voient pas. Carmen voit par contre des coyotes depuis ses fenêtres.

Le lendemain, marché des artisans à Bayfield, la belle-famille de Carmen est là, pour vendre des petites flûtes de confection maison et quelques pendentifs en pierres fluorescentes, collectées sur les plages du lac.
Nous contournons le lac Supérieur par l’ouest, passant la frontière canadienne à temps, notre visa expire le lendemain. Nous avions comme il se doit terminé nos aliments frais mais la douanière canadienne très aimable n’est pas montée à bord et ne nous a pas posé de questions à ce sujet. Seuls les armes, les alcools et les cigarettes ont fait l’objet de ses questions et notre retour prévu en bateau. C’est à ce poste d’entrée au Canada que notre petite fiche est enlevée du passeport pour quittancer notre sortie des USA, la douane canadienne la transmettra aux douanes US. Nous pensons qu’il est important de demander que cette fiche soit enlevée du passeport à la sortie des USA, mais n’avons pas testé les conséquences d’une omission.
Une étape à dormir dans la forêt au bord d’un petit lac, la moindre place répertoriée est prise, c’est samedi soir! Mais de ce fait, nous dormons hors place, directement au bord de l’eau, bien plus joli que les emplacements enfouis dans le bois; tout aussi habité….par un choix d’insectes divers.

Nous avons beaucoup roulé ces derniers temps, s’impose une étape dans un camping près de Thunder Bay, rive nord du lac Supérieur, lessive et baignade dans la rivière, piscine naturelle de plus de 2 mètres de profond.

Le temps est changeant, brumeux d’humidité, nous dépassons plusieurs cyclistes, le tour du lac est un classique de quelque 2300 kilomètres! Beaucoup de parcs, de sentiers de ballades indiqués mais nous préférons avancer, dormant à Terrace Bay, une magnifique plage puis arrivant près de Wawa. Pour éviter les autoroutes de Montréal, Québec, nous décidons de passer par le nord, apparemment, nous avons de la peine à l’idée de retourner dans la civilisation! Mais au carrefour, une hésitation: et si nous allions juste prospecter à Wawa où il semble qu’il ait une bonne location de kayaks, histoire d’avoir des renseignements pour une autre fois…

Les deux plages de chaque côté du promontoire sont idylliques, connues des peintres naturalistes, l’eau excellente mais fraîche pour se baigner (selon moi, donc comprenez que j’étais seule à nager), le temps annoncé beau pour le lendemain. Rendez-vous pris: ce sera 3 heures avec une monitrice, puis les kayaks pour nous le reste de la journée. Nous faisons un peu d’échauffement et de théorie puis une petite sortie sur la rivière avec beaucoup d’exercices, virages longs et courts, safran à l’eau ou relevé, exercices de chavirage et remontée à bord, le plus difficile. L’après-midi, des bonnes petites vagues courtes ont corsé notre sortie sur le lac; alors nous sommes revenus admirer la hutte de castors sur la rivière.


Le soir, une des plages pour nous, et notre feu.


Enfin, nous pensions être tout seuls quand dame cane a passé….Cet espèce groupe les jeunes de plusieurs familles, une garderie? Oui, dans une stratégie de protection. La masse de canetons est plus imposante et leur chance de survie augmentée; à terre, une grosse boule, sur l’eau une ligne dense et serrée; nous peinons à compter la vingtaine de becs.

Le second soir, un jeune couple plante son gros 4X4 sur la plage bien en pente, et de sable bien profond … Je vous épargne nos commentaires et leur étonnement de s’être enlisés. Ainsi, nous savons que nos plaques de désensablement sont très efficaces sans s’être enlisés nous-mêmes!
Enchantés de nos débuts en kayak, nous filons au nord, longue route de plusieurs centaines de kilomètres dans la forêt pour Val d’Or puis Chibougamau. Le Canada des rivières, étangs, lacs, est bien présent mais se voit peu depuis la route car la forêt est très dense. En allant vers le nord, les épinettes si typiques laissent un peu plus d’espace aux marais, la canopée perd aussi de la hauteur, le paysage s’ouvre plus.

Val d’Or:

  • Des mines d’or encore en fonction, un village minier historique aux jolies maisons de rondins entièrement bâti par la compagnie dans les années 1933-34, donc relançant l’économie en pleine dépression,
  • La terrasse sympathique d’une microbrasserie où le serveur, aussi assistant social actif chez les Indiens nous parle du long chemin qu’il reste à combler entre Blancs et autochtones, du racisme encore présent, des différences de qualité entre écoles en ville et écoles en villages autochtones, de la délinquance des jeunes, de l’argent vite gagné dans les mines, mais de l’absence totale de sécurité de l’emploi.

Chibougamau:

  • Une île en quelque sorte: au bout de 400km de forêt, oû il est souvent difficile de s’écarter ne serait-ce que pour la pause de midi,
  • Une ville aux maisons proprettes, aux jardins fleuris, quelques boutiques. Malheureusement pour ma recherche d’ aiguille circulaire, ce sont les vacances et la boutique de laines est close. Je remarque que c’est également une structure sociale d’écoute pour les femmes, en cas de violence par exemple, et un centre de promotion de l’allaitement! Du social pratique, génial, non?
  • Nous dormons au bord d’un lac, sur le petit parking des employés du service des eaux, comme nous le réalisons le lendemain matin. Mais personne n’y trouve à redire quoi que ce soit.

Village Oujé Bougoumou, proche de Chibougamau:

Village Oujé Bougoumou, proche de Chibougamau:

  • Village Cri (nation indienne), architecture moderne mais inspirée par la culture cri,
  • Bâti de toutes pièces avec le support de la compagnie hydraulique ayant construit des barrages dans ce territoire pour les Cris devant se reloger. Le village est au ralenti, un week end durant les vacances, donc impossible d’essayer de sentir s’il a une âme,
  • Des affiches encourageant à garder sa culture tout en prenant son avenir professionnel en mains,

Quittons l’Ontario pour arriver au Québec, nous nous délectons de l’accent et des expressions, d’une baignade dans le lac St Jean, d’un petit arrêt à Chicoutimi où nous étions venus en hiver trouver Joseph qui y étudiait. Souvenirs, souvenirs aussi à Tadoussac et en passant devant le zoo de St Félicien, une région que nous avions visitée en famille lors d’un précédent voyage.

Visite d’une cabane à sucre familiale. L’eau d’érable est concentrée par osmose et par évaporation en sirop. La collecte ne se fait qu’au printemps, idéalement lors de températures de-5C la nuit et +5C le jour.

Nuit au joli village de Sainte Rose du Nord.

Depuis des mois que nous vivons au rythme des bonnes surprises, de notre envie de s’arrêter ou d’avancer, notre programme se construit au jour le jour, alors dans l’après-midi nous nous rendons aux Escoumins pour prendre le traversier et continuer notre périple sur la rive Sud du St Laurent.
« Pas sûr que vous embarquiez, mon traversier est plein »
« Pas de soucis nous attendrons le suivant »
« Il n’y en a plus ce soir et aucune place avant deux semaines ». Moi qui avait la réputation de l’organisation détaillée bien à l’avance et qui réservait les vacances d’été familiales à Noël, cela me semble juste impensable de m’organiser deux semaines à l’avance!!!
Après nous avoir donné de l’espoir, nous n’embarquerons pas et filerons à St Siméon (pas de réservation) où nous aurons plus de chance en étant le dernier véhicule embarqué. Mon sens de l’organisation s’est mué en plaisir de savourer l’imprévu jour après jour.


Brouillard sur le St Laurent

Yellowstone ou une semaine sur un couvercle de marmite à vapeur en surchauffe

La surprise de l’étape: qui est ce nageur?Nous sommes en camping au milieu du parc grâce à une colocation de place in extremis, avec un jeune couple de Bernois. Partis à 6h20 avant déjeuner, nous sommes arrivés vers 9h30, bien trop tard. Ils étaient devant nous dans la file et ont eu l’avant-dernière place, ouf! Après 2 jours, nous gardons la place pour nous, prêts à la partager, mais n’avons aucune demande dans ce sens. Ce n’est pas trop la coutume.Nous roulons de geyser en vapeur fumante, et en petits lacs bouillants de différentes couleurs. C’est magique!
En résumé: Une éruption a eu lieu il y a 640000 ans, laissant un immense cratère de plusieurs dizaines de kilomètres de diamètre. Ce cratère solidifié est mince, la croûte terrestre n’a que 2 à 5 km d’épaisseur. L’eau de pluie et la neige percolent à travers cette croûte et atteignent des roches chauffées  par le magma. Sous pression par la chaleur,  et surélevé de 600 mètres par le jeu des plaques tectoniques, cette eau sort un peu partout dans ce parc. S’il y a constriction, cela fait des geysers, si le canal de sortie est plus large, des lacs fumants, des sources chaudes et des lacs de boue en ébullition continue si l’eau a dissout beaucoup de roches lors de sa montée. La vapeur , qui peut atteindre plus de 200°C,  se chargent aussi de minéraux tels que l’arsenic, le manganèse, le fer par exemple, tous colorés.
Mais la géothermie se complète par la microbiologie! Un voyage aux origines de la vie. Nous pouvons contempler les mares et lacs d’un turquoise parfait et lumineux et les ruisseaux oranges et verts d’un oeil purement artistique, ou réaliser que nous sommes devant des populations de bactéries vivant dans des conditions extrêmes, étudiées comme « modèle » du début de la vie. Des algues et des bactéries dont des thermophiles extrêmes, vivent à l’aise certaines à 70°c, d’autres à 50°C, certaines en milieu alcalin, d’autres en milieu acide. Les bactéries spécifiques à diverses températures ont des pigments différents d’où des mares vertes pour les algues (préférant le tiède), oranges ou bleues turquoises pour les bactéries. Un vrai thermomètre coloré! Certaines bactéries spécifiques se royaument dans une eau acide, transformant les oxydes de soufre en acide sulfurique dans un milieu très riche en fer. Elles sont étudiées car ce sont des conditions assez similaires à celles de la planète Mars. La palette de dame Nature peintre est donc bien odorante! Ailleurs, la silice à la blancheur de porcelaine se dépose autour de certains geysers.  

La fréquence des éruptions est très variable, les geysers connectés par leur réseaux souterrains ont des éruptions aléatoires alors que les solitaires sont plus réguliers, pour la joie des touristes qui arrivent au spectacle à la bonne heure.
Entre les groupes de geysers, sources chaudes, trous bouillonnants et rugissant comme des portes de l’enfer, nous parcourons des étendues de forêts, de prairies de sauges et de zones humides incroyables, entre 1900m. et 2700m. d’altitude. Là, c’est la traque à la faune, en voiture, assez rocambolesque. Les photographes de petites fleurs peuvent créer un attroupement, un bouchon….comme les bisons ou les wapitis décidant de traverser la route.  

Pour nous, la bonne surprise aura été un bison décidant de changer de rive de rivière. Nage tranquille, sortie de l’eau un peu lourdaude, puis il s’est ébroué la tête comme le font les chiens! Mais la tête d’un bison, c’est vraiment impressionnant!Nous optons pour des levers tôt, retour à la tombée de la nuit, histoire d’admirer les geysers sans la foule et de voir plus d’animaux le soir. 
Troupeaux de wapitisUn coyote un peu paniqué m’oblige à bien ralentir
Pour les balades, nous peinons un peu à dire vrai. Les geysers sont ce qu’il y a de plus spécial relativement aux autres parcs et pas besoin de grandes marches pour les admirer, de jolies petites balades permettent quelques beaux points de vue relativement tranquilles. Nous sommes drillés à chaque début de sentier, à chaque discussion avec les rangers, sur chaque table de chaque place de camping, lors de l’achat de….notre spray contre les ours. Nous pourrions mimer en dormant les bons gestes devant l’ours non agressif, le grizzli agressif, et celui ayant passé à l’attaque, également différencier l’ours noir et le grizzli par le profil et par les traces. Mais pour partir en longue marche, nous avons un peu d’hésitation, bien que les risques pris en roulant jusqu’ici soient bien plus importants! 

Un jour nous roulons plus de 200 km dans le parc, pique-niquant, nous arrêtant systématiquement aux bonnes clairières à la bonne heure pour admirer enfin ces fameux ours. Rentrés bredouille de nuit au camping, le voisin arrive: « Faites attention, ne sortez pas de nuit, une ourse et ses 2 rejetons étaient ici même, dans le camping, aujourd’hui ».  
Le lendemain, nous améliorons notre technique: nous nous arrêtons comme toujours lorsque nous voyons des voitures arrêtées pour apprendre qu’il ya eu des ours, qui sont maintenant partis. Schéma classique. Nous décidons de rester sur place lorsque tout le monde s’en va, et en effet les 2 ours noirs se sont remis en marche, nous les avons vus!
Nous quittons le parc par le nord est, la vallée de Lamar, vallée glaciaire magnifique. Là, de petits groupes de voitures se sont arrêtés pour différentes mères ourses noires avec leur ourson. Nous les avons manqué de peu et décidons de rester sur notre place d’évitement. L’avantage avec notre hanneton, c’est que nous avons toujours le garde manger, le tricot, la lecture, les jumelles avec nous! L’ourson revient, mais je le repère en marchant, où est la mère? Nos jumelles et nos regards bien dirigés vers cet « adorable » ourson noir au museau clair, commencent déjà à créer un début d’attroupement. Là, la mère arrive tranquillement, …et se dresse, quelle bête impressionnante, les consignes si bien répétées ne sont appliquées par personne! L’ourson choisit de brouter et fouiner le sol en se rapprochant toujours plus de nous, les 90 mètres de sécurité ont grandement rétréci, la mère ne suit pas, nous ne la verrons plus. Nous avons regagné la proximité de notre hanneton, et réalisons que cet ourson a déjà bien la taille d’un petit mouton. Perdu de vue, puis revu plus loin, l’ourson aura fait une promenade d’en tout cas 1 km le long de la route, créant un bel embouteillage. 

Nous quittons le Yellowstone, et passons le lendemain le col de Beartooth à plus de 3300m., névés, vent, grands plateaux, canyons avant de descendre dans les grandes plaines.

Europe – USA : en cargo avec un camping car

  • Délai: plusieurs mois à l’avance, mais avec beaucoup de chance: 1 mois
  • Transport: en cargo. Les papiers à remplir sont nombreux, répondre rapidement à chaque étape.
  • Camping car: doit être très propre à l’extérieur, effets personnels non visibles, ne rien laisser de valeur, mettre au maximum les affaires dans le coffre fermé si possible, conseiller de prévoir des housses pour les sièges avant.
  • Prix: proportionnel au volume du camping car (48.50 euros/m3). Conseillé: assurance marine, en cas de dommages au camping car. Prix proportionnel à la valeur à neuf déclarée.
  • Gaz : n’avoir aucune bonbonne de gaz avec soi est le plus simple pour n’avoir aucun problème au port pour embarquer. Bonbonnes rechargeables, prévoir de les mettre sur le pont, vides. Bonbonnes fixes, ou réservoir, les vider et les faire nettoyer par un spécialiste et avoir un certificat de nettoyage.
  • Passagers: 6 cabines de 2 personnes par bateau, avec ou sans hublot suivant les bateaux, certaines plus spacieuses, mais avec une différence de coût plus que notoire. Prévoir quelques nuits pouvant être modifiées en fonction de la date de départ, dans un hôtel à Anvers au départ et à Halifax au départ et à l’arrivée. Le chargement et déchargement du cargo prenant du temps. Seabridge donne toutes les explications à ce sujet. Vous pouvez aussi laisser votre camping car et voyager en avion, à chacun son choix, son temps et son empreinte carbone. Malheureusement, n’espérez pas faire des économies en voyageant en cargo, mais apprêtez-vous à prendre le temps de vivre votre voyage autrement et de savourer l’observation de la vie d’un grand port, de la vie à bord, du temps de la lecture ou ….du tricot!
  • Assurance RC: Pour rouler en Amérique du Nord, assurance Thum proposée par Seabridge. Contrat de 6 ou 12 mois, prix dépendant de la valeur à neuf déclarée, https://www.seabridge-tours.de/html/versicherung.php?language=french
  • Dépannage: aucune assurance trouvée, ni par l’ATE, ni par le TCS, ni par Fiat assistance. Croire en sa bonne étoile!
  • Assurance maladie, rapatriement: être en mesure de prouver sa couverture pour ces cas.
  • Permis: permis international
Et si vous préférez un récit plus explicatif: référez-vous au blog très complet d’une famille « parenthèsnomade », https://www.parenthesenomade.fr/. Ainsi vous aurez définitivement l’envie de partir!

Anvers-Halifax, du 8 au 19 avril 2019

Nous embarquons à bord du Grande Senegal le lundi matin 8 avril et quitterons Halifax le mardi soir.

Le grande Senegal navigue sous pavillon italien, l’équipage du poste de pilotage est essentiellement de la région de Naples alors que les ingénieurs et l’équipe des machines sont des Philippins. Grande Senegal est un cargo mixte, soit en jargon, RO-RO (roll in-roll out) ce qui signifie qu’il a un pont avant pour les containers, et des garages à l’arrière. Notre cargaison se compose de près de 300 containers et plus de 500 énormes machines de chantier, nécessitant de naviguer plus précautionneusement dans le mauvais temps;

de plus il ne mesure que 210 mètres alors que les cargos mixtes plus modernes ont une longueur de plus de 300 mètres. Fréquemment, comme la semaine passée, ce cargo effectue une liaison entre le Ghana et le Texas. Suite à la panne survenue sur un grand cargo de la même compagnie Grimaldi, il a été détourné depuis le Ghana pour venir nous chercher ainsi que la cargaison prévue pour le vaisseau mis en cale sèche. Nous sommes donc aux mains d’une équipe extrêmement chaleureuse, sur un cargo qui n’a jamais pris de passagers avec de surcroît un capitaine napolitain à 200%, soucieux de bien nous accueillir. Pratiquement, nous dégustons les spécialités napolitaines et siciliennes, à chaque repas, parfois des biscuits d’apéritifs ou des en-cas viennent encore s’ajouter.

Nous mangeons pâtes ou risotto, poisson et viande plusieurs fois par jour, visitons la cuisine et le poste de pilotage aussi souvent que nous le voulons de façon tout-à-fait libre et informelle.

Lundi nous observons le chargement des containers et des énormes machines de chantier.

L’idée est de mettre nos 4 pick up, camping cars et camion à la fin pour pouvoir sortir en premier. Au milieu du souper, nous sommes appelés et devons retourner en voiture au parking où sont nos véhicules. Chacun a un autre système pour le gaz et les autorités portuaires bloquent l’accès au bateau, n’étant pas assurées que personne n’a de gaz à bord. Pour nous, pas de soucis, nous ouvrons notre coffre pour montrer l’emplacement de nos bonbonnes, vide, nous avions laissé notre bonbonne suisse au camping à Anvers pour la récupérer au retour. Un couple a un Hymer avec bonbonnes fixes remplissables, mais vides. Il leur manque un certificat attestant le nettoyage du système, et le chef du port ne veut pas les laisser passer. Après promesse que le système sera démonté une fois le camping car chargé, par un de nos compagnons de voyage, chauffeur de camions professionnel et muni d’outils, le véhicule est autorisé à approcher du bateau. Notre cargo est plein, et il y a maintenant des discussions quant à la place. Heureusement, le second de notre bateau n’est pas d’accord avec le chef du port, et prend la responsabilité de charger nos 4 camping cars (une Land Rover avec cellule est déjà dedans depuis longtemps), le nôtre en premier car sa petitesse est à nouveau un atout! Nous bouchons un petit trou laissé entre une énorme machine et la poupe; aïe ! la grosse machine ne doit pas broncher!

Tous les véhicules sont fixés par des chaînes et des sangles accrochés dans le sol.

Après bien une heure de gros soucis pour le couple ayant l’Hymer à bonbonnes fixes, le dépôt sur le pont de la bonbonne de gaz du camion d’un autre couple, nous retournons finir de souper soulagés. Gaby et Juergen partent pour 2 ans ou plus avec leur Hymer, ils n’ont plus d’autre logement, ont les deux quittés des places de travail à haute responsabilité pour vivre à un autre rythme.

Mardi soir, c’est le départ, nous sommes tous dans la cabine de pilotage, large de plus de 30 mètres, pour le passage de l’écluse nous menant sur L’Escaut. Nous apprenons à lire les différents écrans, notre vitesse sera d’environ de 17 nœuds (26 km/h) en plein océan.

Le temps s’écoule paisiblement, l’occasion que le capitaine s’ouvre, nous parlant de son petit-fils de neuf mois qui lui manque, du bel appartement qu’il peut offrir à sa famille grâce à ce travail. Le second est croate, aussi issu d’une famille d’officiers de marine, mais heureux que son fils stoppe cette lignée. Le temps dans les ports devient très court car les marchandises sont toutes en containers, le métier perd de l’attrait et la motivation principale semble surtout pécuniaire. Les équipages italiens naviguent pendant quatre mois puis ont deux mois de repos à la maison, les philippins ont des contrats de huit mois.

Mercredi, nous nous mettons en marche…moyennant de suivre les lignées de fixation pour voitures sur le pont arrière vide, en faisant bien toutes les lignes, nous arrivons à marcher plusieurs kilomètres, matin et après-midi. Nous testons aussi la corde à sauter avec roulis, étonnamment plus facile que la course et fixons notre élastique à différents barrières et crochets pour inventer de la variété dans nos mouvements.

L’ambiance est très sympa dans le groupe, nous avons tous notre projet, des véhicules bien différents et il n’y a aucune prise de tête. Nous rions à la proposition de notre capitaine que les dames viennent voir la confection des pâtes fraîches le lendemain: pourquoi seulement nous? Parce qu’un homme ne va jamais dans une cuisine, comme une femme na va pas dans la cave où sont le bonnes bouteilles, les verres et les saucissons pour l’apéro! Nous sommes à Naples….au milieu de la Manche.

Jeudi matin, nous sommes tous, y compris le capitaine en cuisine avec Michele, le cuisinier sicilien, 8 oeufs par kilo de farine, la pâte à lasagnes est étalée en la passant par une sorte d’étau manuel de 2 rouleaux.

Michele, au vu de ses 9 passagers majoritairement germanophones a complété chaque jour le petit-déjeuner à l’italienne avec de la viande froide, des yoghourts et des spécialités telles que pâte à pizza avec des oignons, beignets au séré. Ceci en plus des repas à 3 plats à l’italienne, le poisson et la viande nous sont servis seuls dans l’assiette, la salade venant ensuite.

L’équipage des machines a un autre réfectoire et des menus adaptés à leur culture, vu qu’ils sont philippins. Notre capitaine estime important que chacun puisse manger selon ses coutumes. Nous sommes 35 en tout à bord. P.-Olivier a très vite une bonne relation avec Michele, le cuisinier, ayant repéré son choix de cafetières italiennes.

Après la cuisine, visite de la salle de contrôle et des machines avec les ingénieurs philippins.

Le moteur du bateau sert aussi de générateur pour l’électricité par temps calme. En cas de mauvaise météo, le courant n’est pas assez stable et il ya 4 autres générateurs disponibles pour produire l’électricité. Nous avançons avec une puissance de 13000 KW, le moteur a 8000 chevaux.

Nous voyons les cylindres, l’axe de transmission de la direction au safran, l’installation de désalinisation de l’eau de mer par distillation.

L’eau de refroidissement est en circuit fermé. L’eau usagée, déchets broyés, est traitée avec des bactéries aérobies puis chlorée pour les tuer avant le rejet à la mer.

La vie suit son cours, nous passons des moments agréables, émouvants, intéressants:
  • La marche sur le pont arrière est remplacée par la marche dans un garage à voiture vides (nous en avons sur 5 étages), à cause du vent trop fort. Une table de ping-pong est installée à notre intention, chaque moitié étant fixée de part et d’autre d’un pilier du garage. Le filet est remplacé par un espace de bien 20 cm entre les deux moitiés! Intéressant, nous arrivons à bien jouer malgré le roulis. Le sol est ponctué de trous donnant sur l’étage d’en-dessous, probablement pour évacuer l’eau si nécessaire. Un challenge supplémentaire est donc de garder notre balle sans la perdre au niveau inférieur auquel nous n’avons pas accès.

  • L’équipe des machines est tellement enthousiaste de nous expliquer leur travail. Ils n’ont jamais eu de visiteurs et demandent à nous photographier dans leur salle de contrôle. Un jeune ingénieur nous montre des exemples d’écran, le niveau de tous les réservoirs du bateau, fuel, eau, toujours équilibrés et le niveau des réservoirs d’eau de mer servant uniquement de ballast aussi équilibrés en permanence, pendant le chargement de la cargaison et pendant le transport. Il a 26 ans, est déjà second car il a étudié très vite, a deux petites filles et lors d’une autre discussion, nous confie que son salaire est 8 fois supérieur à celui qu’il aurait aux Philippines. Son anglais et ses explications sont claires, précises. La plupart des marins du monde entier sont philippins, en tout cas dans les salles de machines. Grimaldi engage par ailleurs surtout des Italiens comme marins de pont. Dans les entrailles du navire, voir l’axe bouger, côtoyer dans le roulis les générateurs, les cylindres est assez impressionnant.
  • Nous passons de longues heures dans le poste de pilotage, regardons les cartes sur écran ou papier, les instruments, apprenons à lire notre vitesse, notre cap et contemplons l’océan ou le brouillard parfois, les jets des baleine au large des Açores. Le dernier jour, nous avons la chance de voir plusieurs groupes de dauphins, sautant hors de l’eau, parfois plusieurs en même temps, un magnifique ballet. La cabine est un espace aéré, plus frais, le seul avec fenêtres et les 2 “chaises de capitaine” surélevées, jamais utilisées par ce dernier, sont l’endroit idéal pour tricoter avec un oeil sur l’eau. Le capitaine vient parfois aux nouvelles, suis-je Pénélope?

    Mais non, après le corps, la première puis la seconde manche; donc parfois la pièce de tricot est plus petite que celle de la veille!

  • Pierre-Olivier joue aux échecs avec Henning. Avec son amie Bianca, architecte comme lui, ils ont dessiné, fait construire et cherché sur internet les différents éléments de leur « boîte habitable» posée sur un ancien camion de l’armée autrichienne. Leur véhicule de 10 tonnes est très impressionnant, et nous nous réjouissons de le visiter, Bianca a cousu elle-même les tissus des meubles et le cuir des sièges. Les toilettes sèches ont été testées dans leur cave avant d’entrer dans “la boîte”.
  • Les matchs de Zim Zim (Baby foot) permettent d’attendre l’heure des « pasta ».

  • Nous apprenons et participons à la confection des Canollos, ces rouleaux siciliens en pâte à beignets fourrés de crème au séré ou au chocolat.

    Nous suivons aussi la confection des Arancine, grosses boulettes de riz fourrées à la viande hachée, au fromage et aux petits pois. Le nombre d’ingrédients différents par repas est très important, parfois pâtes, fromage, viande, poisson, salade, lentilles voir pommes de terre répartis entre nos 3 plats. Tout est servi avec beaucoup de gentillesse, Michele est un cuisinier passionné. Ce voyage n’est toutefois pas à comparer avec un séjour touristique, il n’ya pas de chaises sur les ponts, nous avons parfois des tripes, le vin est plus apprécié pour le sourire avec lequel il est offert que pour sa qualité! Il fait aussi parfois très chaud à l’intérieur, j’adore le roulis la nuit mais nous manquons d’air frais.

  • Comme partout, la buanderie est aussi un endroit où papoter avec l’équipage, une machine nous y est réservée, mais la température des différents programmes reste un mystère, très chaud!

  • Tout le monde est heureux de se sentir loin de tout, mais lorsque nous passons au sud des Açores, chacun profite du réseau pour téléphoner, voir ses mails.

    L’équipage est aussi dehors, téléphone collé à l’oreille, une effervescence de quelques heures, nous manquons même le moment de confectionner nos pizzas! Cet après-midi, soleil, et ciel bleu remplacent la grisaille, la bruine et le brouillard.

    Nous participons à un exercice, « feu à la buanderie » destiné à l’équipage et évacuation en bateau de sauvetage pour nous, ce qui nous donne l’occasion d’en voir l’intérieur.

    Mais les canots ne sont pas descendus à la mer, nous jetons juste un oeil dedans.

    Les vagues ont jusqu’à 6 mètres de haut, ce qui est difficile à croire depuis l’étage 12, le plus élevé, celui de la cabine de pilotage, environ 38 mètres au-dessus de l’eau.

  • Nous croisons très peu d’autres navires, quelques voiliers, très grands (35 mètres selon les caractéristiques données par le radar), les jumelles sont aussi à disposition.
  • En traversant le Gulf stream, l’air est agréable, l’océan vraiment bleu mais couvert de moutons brillants au soleil. Moments de détente au soleil à l’extérieur, mais pour la balade, il faut lutter pour aller droit, et parfois abandonner.

  • Le dernier jeudi, l’équipage nous prépare un apéro surprise et nous offre différents objets souvenirs, une casquette de protection, T-shirt Grimaldi, une ancienne carte marine et un certificat pour nos plus de 3000 miles nautiques, et nos acquis culinaires tels que la confection des lasagnes! Nous avons aussi des attentions sonnantes pour notre cuisinier, notre serveur et homme de ménage, et pour le prochain barbecue de l’équipage.

    J’ai aussi tricoté des moufles pour le petit-fils du capitaine, il nous en a tellement parlé!

    Nous arrivons à Halifax samedi matin 19 avril, ayant dû ralentir notre allure pour arriver à la bonne heure au rendez-vous avec le pilote de port. Notre route très au sud nous aura permis d’éviter 3 dépressions sérieuses, des vagues de 12 mètres, infranchissables avec notre cargaison. L’océan est calme pour l’arrivée mais il souffle un fort vent très froid dans la grisaille d’Halifax.
    C’est vendredi Saint et nous devons attendre lundi pour que les douanes inspectent nos camping car.