Chemin de Saint Jacques de Compostelle: du Rhône au plateau du Pilat enneigé, puis à Puy-en-Velay, 13 au 21 avril 2023

De Chavanay, nous montons d’abord dans les vignes, puis entre les vergers de pommiers et d’abricotiers, équipés de petits brûleurs à cire entre chaque arbre pour parer aux nuits froides. Soleil, pluie et finalement un peu de grêle à la Croix de sainte Blandine (600 m. d’altitude) avant d’arriver à st Julien Molin Molette. Nous faisons nos emplettes pour un souper simple exceptionnellement pris en tête-à-tête. Au gré des pauses, nous voyons plusieurs fois un couple d’allemands et quelques autres pèlerins.

La prochaine étape nous mène à travers la forêt au col du Tracol,  puis à 1240 m. d’alt., adieu le bassin du Rhône,  passant la ligne de partage des eaux, nous entrons dans celui de la Loire. Nos chemins sont de larges travées d’exploitations forestières (!…). Sur l’autre versant, la végétation est beaucoup plus variée. Pluie,  temps frais,  restes de neige du jour; presqu’arrivés, Pierre-Olivier a un petit coup de rhume et  de fièvre. L’organisation est parfaite, il soigne sa petite crève, nous prenons un jour de repos au gîte des Sétoux,  deux nuits à profiter du meilleur confort jamais eu depuis le départ et il neige et vente toute la journée; nous sommes à 1100m. d’alt. Une meilleure synchronisation aurait été impossible.

N’ayant aucune provision, nous allons à midi au café du hameau, restaurant de Pays proposant le bœuf AOP Fin Gras du plateau du Mezenc, une découverte gastronomique et intéressante. Les vaches sont dehors l’été, dans des prairies d’altitude de fleurs variées et spécifiques. Le climat très rude oblige de garder les bêtes à l’étable de nombreux mois, mais elles ne sont nourries qu’avec le foin local, sans enrubannage ni ensilage, d’où le peu de bêtes à l’hectare. La création et le succès de cette AOP préserve l’avenir économique et social sur ce plateau, ainsi qu’une excellente biodiversité.

Bien reposés, nous repartons par le brouillard, auquel nous n’échapperons pas chaque matin les 4 prochains jours, soit jusqu’à Puy-en-Velay. Forêts, prairies, vastes étendues, mais aussi points de vue passés sans beaucoup de visibilité, hameaux plus ou moins vides rendus encore plus lugubres par la brume. Ces étapes nous laissent plus de souvenirs quant aux contacts avec nos hôtes, ou à la variété du confort aux hébergements toujours imprévisible que d’images de paysages exotiques. Toutefois, nous devinons ces collines circulaires, anciens volcans n’ayant jamais explosés, des dômes de magma. Auparavant, nous avions admiré la collection des douze tableaux flamands du 16ième s. (Albert Grimmer) à Montfaucon-en-Velay.  L’histoire de cette collection qui a échappé à la destruction lors des révoltes protestantes et lors de la Révolution, et a ensuite été retrouvée après avoir été volée en 1995 est un véritable roman policier.

http://grofouillis.canalblog.com/archives/2014/10/03/30696026.html

A l’approche de Puy-en-Velay, notre chemin suit la Loire puis la Borne, le soleil est bien revenu, et nous voyons les rochers, plus ou moins plats sur le dessus, anciens cratères remplis de lave refroidie, du basalt, sur lesquels sont construites des églises fortifiées ou la statue de la Vierge « notre Dame de France ». Les volcans eux-mêmes, de roche plus tendre ont été érodés.

Notre Dame de France, faite avec les canons pris aux Russes en Crimée par Napoléon

Chemin faisant, ma cousine arrivée de Londres arrive à notre rencontre; c’est le début de notre pause touristique de deux journées et demi. Cela fait 18 jours que nous sommes en chemin, dont une petite étape esquivée par du stop et un jour complet de pause à se reposer en regardant tomber la neige. Nos jambes, nos pieds, tout va vraiment bien physiquement, mais personnellement je manque terriblement de sommeil. Nous apprécions vraiment le luxe salutaire d’un appartement très confortable pendant ces quelques jours. Le matériel emporté dans nos sacs nous convient, la seconde paire de chaussures non embarquée ne nous manque pas. Là encore, ma cousine a été d’un secours formidable, en me prêtant une paire pour que je puisse donner la mienne à ressemeller.

Cathédrale du Puy en Velay

Nous visitons la vieille ville moyenâgeuse , l’abbaye de la Chaise-Dieu dans les environs. Immense église, cloître et une visite historique très instructive grâce à un circuit animé. Nous sommes dans l’époque des deux papes (Avignon et Rome, la peste noire 1348, la puissance et la richesse de tout le réseau de monastères et d’abbayes rattachés à la Chaise-Dieu) . En ces temps d’extrême pauvreté, l’église justifiait sa richesse comme un besoin de rayonnement, d’apporter du beau et du positif à la misère. Deux papes, ayant un sens certain de la politique et de la diplomatie seront originaires de la confrérie des moines de la Chaise-Dieu. Le premier combattra sans pouvoir l’empêcher le massacre des Juifs tenus responsables de la peste, et tiendra à l’entretien du pont d’Avignon vu que c’est à l’époque le seul endroit permettant de franchir le Rhône, donc de relier Lyon à la mer. Les papes sont à Avignon suite à l’instabilité à Rome. L’architecture de l’abbatiale romane est grandiose, nous faisant presque oublier la température austère et crue dans tout le site.

St Michel de l’Aiguilhe construit sur la cheminée volcanique
Abbaye de la Chaise Dieu
Cloître de la Chaise Dieu

Le soir, nous sommes des gastro-pèlerins, découvrant un petit restaurant branché innovant, ou un tout aussi minuscule café recommandé par nos derniers hôtes où les locaux se retrouvent devant de belles pièces de viande provenant des plateaux aux alentours. Finalement, pour un repas « chez nous », nous profitons de l’Auvergne et de sa légendaire richesse en fromages après une visite guidée proposée par un spécialiste du Moyen-âge, via l’office du tourisme.