Enfin nous repartons, après 7 mois sédentaires, non sans un petit tiraillement au cœur qui montre à quel point nous sommes bien dans notre nouveau nid adjoint d’une terrasse à lézards. Pêle-mêle, un regard, une pensée pour
- Les Ukrainiennes d’Arveyes qui nous ont rappelé la force des contacts non verbaux, le plaisir de rendre service. Le rire et la gaité que ces inconnues ont gardés nous ont impressionnés, leur histoire personnelle ne transparaît que rarement
- Notre rhododendron arborant fièrement de nombreux boutons
- Les tulipes roses ouvertes et les autres fermées…de quelle couleur sont-elles? ….plus très claire dans notre mémoire
- Notre nouvelle vie sociale, les contacts noués suite à notre désalpe, les cours de yoga, les cours de Chi gong….
Il fait beau, notre hanneton frétille d’aise à l’idée de partir au sud. Un soubresaut glacial lors de notre arrêt au Sentier pour écouter « La Passion » jouée par la « Microharmonie » et chantée par un choeur de femmes réunies pour ce spectacle, concert splendide aux effets musicaux inédits nous démontrant une fois de plus qu’à partir d’un certain niveau, il n y a plus d’oppositions entre le moderne et le classique.
Nous descendons dans la Drôme, rendez-vous avec notre groupe de randonneurs à Le Poët-Laval. Visite du petit musée du protestantisme, intéressante grâce au récit du pasteur retraité, Monsieur Croissant. Livre d’histoire vivant sachant la raconter et avoir un regard critique, passionné, empreint d’humour, excellent narrateur, il nous fait partager l’épopée de cette fuite des Huguenots, leur cultes clandestins dans le « désert » (en forêt), le lien entre le protestantisme et la diffusion de la connaissance de l’écriture, de la lecture et de l’imprimerie.
Dans une maison de caractère de 1750, nous nous endormons au son des crapauds, des grillons et du chat au désespoir printanier. Puis c’est parti pour 8 jours de marche.
Le Poët-Laval – Les Grands Bois (18.5 km, +750m,-500m)
Magnifiques forêts de pins aux jeunes pives couleur de miel, de hêtres, et de bien d’autres arbres et arbustes en fleurs le long de romantiques chemins creux; dans les prairies, narcisses et orchis. Chapelle romane de Comps et grands chênes pour la pause de midi. Ciel bleu, température agréable, splendide journée que je terminerai dans la piscine du « Grand Bois », petit hôtel entouré de bungalows. La terrasse nous permet d’apprécier les derniers rayons de soleil avant de de profiter d’une cuisine soignée.












Grands Bois – col de la Chaudière (17km, +850m,-450m)
A nouveau un paysage doux, de jolis sentiers en forêt, un chemin en balcons , des amélanchiers en fleurs, très blancs . Pique-nique au soleil, sentier charmant entre les arbustes en fleurs, un gué et une grimpette en forêt jusqu’au col du Gourdon puis de la Chaudière. La forêt n’est jamais monotone, déployant toute la palette des verts et plus encore, très diversifiée. Du gîte du col de la Chaudière émane une grande sérénité. Nous y resterons 2 nuits.









Randonnée sur les Trois Becs (9km, +/-980m)
Montée bien aménagée, beaucoup de marches d’escaliers, belle végétation. L’excellent chemin permet de gravir la côte raide, érodée du synclinal perché, donc un double plissement érodé à l’extérieur et préservé à l’intérieur, le plus haut d’Europe. Après la montée, quelques passages avec de bonnes marches de gros cailloux jusqu’au pas de la Siara, et nous débouchons dans la prairie, orchis, petites gentianes, un havre de douceur, d’où nous voyons le fond du synclinal, long de 13 km, boisé, aux pentes beaucoup plus douces. En montant au premier bec, le Veyou, de belles structures en branches pour canaliser l’eau de pluie, en levant le regard, que le ciel bleu, les larges marches et la grande prairie. Puis nous longeons la crête, perspectives sur les falaises et les pitons hauts et étroits résultant de l’érosion. Du premier bec, ciel un peu brumeux, plein ouest la vallée du Rhône, plus proche celle de la Drôme. Au troisième bec la lumière est plus nette, toujours des pitons, la vue sur les forêts à l’intérieur du synclinal splendide, mon point de vue préféré. Descente parmi des hêtres tout gris d’abord, pas encore en feuilles ou définitivement secs pour certains; plus bas, ils arborent leur nouveau feuillage.





Col de la Chaudière- Saint Benoit en Diois (13.5km,+250m, -900m)
Une petite étape sous la bruine. Quelle chance, cette météo la veille nous aurait empêché de profiter des 3 Becs. Les forêts sont luxuriantes avec l’humidité.
Par bus, nous rejoignons le camping de Saillans. Il pleut, nous logeons dans des bungalows style mobil-homes, un petit moment de chaos pour organiser nos affaires mouillées dans un espace restreint. La météo redevenue clémente nous permet d’apprécier le souper servi à l’extérieur. Il fait froid pour l’endroit et la saison, nous nous faisons amener les (petits-)déjeuners dans les bungalows le lendemain matin.









Rimons- Die (21km, +650m-1050m)
Longue étape démarrant par un plateau large, ouvert, puis vues sur la Drôme, les contreforts du Vercors. Plusieurs points de vue, une petite vire et finalement la descente sur Die qui n’en finit pas et se termine malheureusement par un pont n’amenant pas en ville directement, nous gratifiant des derniers kilomètres sur le bitume. Accueil très chaleureux dans un tout petit restaurant de Die.
Le lendemain, nous visitons la ville, appréciant notamment une splendide mosaïque, accessible en visite guidée uniquement.





Randonnée l’après-midi jusqu’à l’abbaye de Valcroissant (7.8km, +610m,-400m). Une bonne grimpette en forêt, raide mais régulière jusqu’au pas de Bret, de la vue, et une descente agréable jusqu’au joli vallon ou se niche cette abbaye, d’une grande sérénité, belle demeure convertie en chambres d’hôtes, habitée par une famille exploitant aussi le domaine. Quelques salles anciennes de belle architecture, une salle de repas conçue pour n’avoir aucun écho, afin que les moines puissent manger et lire dans le silence, participent à la beauté du lieu, déjà splendide par l’environnement naturel.









Abbaye de Valcroissant- Chatillon en Diois (12.5km,+790m,-890m)
Une montée, encore une! jusqu’au col des Caux. Pique-nique entre les buis, crête jusqu’au Pié de Boeuf, point de vue avant de descendre raide par le sentier du balcon de Glandasse. La forêt fait place à une végétation plus basse de résineux, plus de cailloux, quelques pierriers de petits cailloux, ceux que les chevilles adorent! Une sérieuse averse nous a donné rendez-vous à Châtillon, pour la pause finale en terrasse. Notre tour ayant été organisé par l’un de nous et une agence (Semelles au vent), nous sommes ramenés à notre point de départ en petit bus.



Nous retrouvons notre Hanneton et départ pour Menée, un peu au Nord de notre arrivée, hameau qui ne s’atteint pas par hasard. Quel plaisir d’être reçus au gîte de la Bergerie. Sérénité, décoration soignée, fauteuils et tapis anciens inattendus, rénovation pleine de charme et d’ingéniosité comme la charpente mise en valeur mais néanmoins réaménagée, les échelles pour pendre ses affaires, les tapisseries exubérantes. Oui, tout ceci donne un tout qui allie design, rénovation, mise en valeur des murs de grosses pierres anciens, idées nouvelles. La fonctionnalité a laissé place à l’artistique. Le soir, les lumières du hameau embellissent la couleur de la pierre des maisons anciennes, sur lequel donne notre fenêtre. La cuisine préparée par nos hôtes Andréas et Nicolas est généreuse, servie autour d’une seule grande table réunissant avec eux tous les convives du moment. Un gîte que je n’oublierai pas.
Le lendemain, d’Archiane, juste à côté de Menée où nous laissons nos voitures, nous avons une vue sur le cirque du même nom, falaises ambrées se dressant devant nous; mais un passage se devine, d’où arrive la rivière. Nous empruntons un sentier de forêt assez raide nous rapprochant des falaises et surplombant le lit de la rivière, nous entrons dans le cirque. Bientôt nous suivons le lit du torrent asséché, certains passages ne sont que des éboulis de pierres. Finalement, quittant l’axe du vallon, nous grimpons les 200 derniers mètres de dénivelé nous séparant du plateau du Vercors dans le pierrier, que du galet roulant, bougeant sous les pieds. Un sentier en lacets y chemine, comme si un petit lutin y avait groupé les cailloux plus petits, les déposant pour constituer une trace aplanie, cassant la ligne de pente. Le cairn du haut dépassé, majestueux et radical changement de paysage, nous nous baladons à plat, parmi des pins isolés, de belles prairies bien vertes et plus loin du calcaire, des lapiaz aux trous de forme alambiquée. Des mousses et des plantes grasses émergent du calcaire, quelques grammes de terre suffisent à leur développement. Nous arrêtons notre balade par un excellent pique-nique, comme chaque jour, et rebroussons chemin. La pluie menace et le dénivelé du jour a déjà été conséquent pour nous, plus de 1100m.










Après une seconde soirée à partager un excellent repas autour de la grande table, en écoutant quelques étapes de l’histoire de cette bergerie, comme le nettoyage des murs noircis par la fumée, ou le fait que le chamois empaillé trônant sur son rocher au salon (un vrai chamois sur un vrai rocher) avait été laissé à cette place par l’ancien chasseur habitant le lieu; nous continuons seuls notre voyage.


Je retiendrai la beauté des forêts, la diversité de la végétation, les lignes douces du relief du début et les points de vue, la forme caractéristiques des 3 Becs, le synclinal perché mais aussi le plaisir de marcher de longues étapes, certains hébergements au charme particulier, le plaisir de partager, la dynamique et l’énergie supplémentaire dégagée par le groupe et plus spécialement lors des montées gravies au même rythme entre copines. J’ai évidemment été rassurée d’avoir retrouvé mon souffle après la pause forcée du dernier hiver et la radiothérapie.